L’évaluation des Droits : Nue propriété et Usufruit

Lors de la revente d’un bien en nue propriété, une évaluation approfondie des droits doit être réalisée afin de déterminer avec précision la valeur de la nue propriété et de l’usufruit. Cette étape est essentielle pour garantir une transaction juste et transparente.

Il existe principalement deux méthodes de valorisation des droits immobiliers en nue propriété :

  1. La valorisation économique : Cette approche repose sur l’analyse des flux de revenus futurs que pourrait générer le bien. Elle prend en compte la rentabilité attendue de l’actif et la rentabilité nette, afin de calculer la valeur actualisée des revenus futurs.
  2. La valorisation fiscale : Selon l’article 669 du Code Général des Impôts (CGI), cette méthode se base sur l’âge de l’usufruitier, en appliquant un barème spécifique qui permet de déterminer la valeur des droits en fonction de l’espérance de vie de l’usufruitier et des caractéristiques du bien.

En plus du choix de la technique de valorisation, les vendeurs doivent définir clairement quel droit est mis en vente. Selon la nature du droit (nue propriété ou usufruit), des conditions particulières doivent être respectées par les parties impliquées. Par exemple, la question de qui perçoit le produit de la vente et la répartition du capital peut varier, selon que la vente concerne la nue propriété seule ou l’usufruit. Il est donc crucial que les conditions de la transaction soient bien définies pour éviter toute ambiguïté.

Les deux méthodes d’évaluation doivent également prendre en compte le type de démembrement du bien, car la nature du démembrement influe directement sur la valorisation.

Le démembrement viager

Dans ce cas, l’usufruit est attribué à une personne pour une durée qui dépend de son espérance de vie. La vente en démembrement viager utilise souvent la valorisation économique qui est généralement plus pertinente dans ce type de démembrement, car elle tient compte des flux de revenus futurs générés par le bien, avec des ajustements en fonction de l’âge et de l’espérance de vie de l’usufruitier. La valorisation fiscale, quant à elle, s’appuie sur l’âge de l’usufruitier pour déterminer la valeur de l’usufruit et de la nue propriété.

L’acheteur acquiert la nue-propriété du bien au moment de la transaction, tandis que le vendeur perçoit un capital tout en conservant l’usufruit, c’est-à-dire le droit d’occuper le bien ou de le mettre en location.
Pour le vendeur, la vente de la nue-propriété viagère lui offre la possibilité de générer un capital supplémentaire tout en continuant à profiter de l’utilisation du bien.

La valorisation fiscale

Lorsqu’il s’agit d’un démembrement avec usufruit viager, les droits de mutation sont déterminés en fonction de l’âge de l’usufruitier, en appliquant un barème fiscal qui exprime la valeur des droits en pourcentage de la pleine propriété. Dans le cadre d’un droit d’usage et d’habitation (DUH), l’administration fiscale retient généralement 60% de la valeur de l’usufruit viager calculée. Cette évaluation est couramment utilisée pour les successions et pour le calcul des droits dus par le conjoint survivant et les héritiers.

Âge de l’usufruitier Valeur de l’usufruit Valeur de la nue-propriété
Moins de 21 ans révolus 90 % 10 %
31 ans révolus 80 % 20 %
41 ans révolus 70 % 30 %
51 ans révolus 60 % 40 %
61 ans révolus 50 % 50 %
71 ans révolus 40 % 60 %
81 ans révolus 30 % 70 %
91 ans révolus 20 % 80 %
Plus de 91 ans révolus 10 % 90 %

La valorisation économique

La valorisation économique permet d’évaluer un bien en utilisant la méthode d’actualisation des flux de revenus futurs. Cette méthode repose sur l’estimation des revenus nets attendus (revenus fonciers, par exemple) générés par le bien au cours d’une période déterminée. Ces flux sont ensuite actualisés à une valeur présente en tenant compte de facteurs comme l’inflation, le taux d’intérêt, et la durée de la période.

Dans des situations telles que la vente en nue propriété avec réserve d’usufruit ou la réservation d’un droit d’usage et d’habitation (DUH), ainsi que dans le cadre d’un droit de nue propriété transmis par donation ou succession, la valorisation du droit de nue propriété se fait également selon cette approche économique. En utilisant cette méthode, on calcule la valeur de la nue propriété en prenant en compte le montant qu’un propriétaire pourrait raisonnablement attendre de la vente de son bien sur une période donnée. Cette évaluation se fait généralement à l’aide d’une table de mortalité ou d’assurance, qui permet de prédire, selon l’âge de l’usufruitier, la durée probable de l’usufruit et donc le montant exact de la nue propriété. Cette technique permet ainsi de déterminer de manière plus précise la valeur d’un bien immobilier dans des situations complexes de démembrement ou de transmission patrimoniale.

Le démembrement temporaire

Le démembrement temporaire est la seconde forme de démembrement de propriété dans laquelle l’usufruit est attribué pour une période fixe. Contrairement au démembrement viager, qui dure toute la vie de l’usufruitier, l’usufruit temporaire permet de limiter la durée de jouissance d’un bien tout en transmettant la nue-propriété. Ce mécanisme offre une flexibilité et une projection intéressante pour les projets patrimoniaux, notamment dans le cadre de la gestion de biens immobiliers, de la planification successorale ou de la préparation à la retraite.

La valorisation fiscale

Dans le cas d’un démembrement avec usufruit temporaire, la valeur fiscale de l’usufruit est déterminée selon le barème prévu par l’article 669 du Code Général des Impôts. Ce barème stipule que l’usufruit est évalué à 23% de la valeur totale du bien en pleine propriété pour chaque période de 10 ans. Cette évaluation se fait sans tenir compte de l’âge de l’usufruitier ou de son identité et sans appliquer de fractionnement, ce qui signifie que la valeur de l’usufruit est calculée de manière uniforme sur chaque période de 10 ans.

Ce taux de 23% est appliqué systématiquement par tranche de 10 ans, même si la période d’usufruit accordée est inférieure à cette tranche. Par conséquent, même si l’usufruit ne couvre pas l’intégralité de la période de 10 ans, le taux reste le même, et la valeur de l’usufruit ne peut excéder celle qui serait attribuée dans le cadre d’un usufruit viager. Ce principe assure une certaine stabilité dans l’évaluation de l’usufruit temporaire, indépendamment de la durée exacte du démembrement, et limite la valeur totale de l’usufruit par rapport à la pleine propriété du bien.

L’usufruit temporaire ne peut pas excéder 30 ans. Cette règle, inscrite dans le Code Civil (article 619), limite la durée de l’usufruit temporaire pour éviter qu’il ne devienne trop long et s’apparente à un usufruit viager, qui dure toute la vie de l’usufruitier. En cas de durée supérieure à 30 ans, l’usufruit est automatiquement limité à 30 ans. Cette disposition garantit un équilibre entre les droits de l’usufruitier et ceux du nu-propriétaire, en empêchant un usufruit de durée excessive.

La valorisation économique

La valorisation économique consiste à déterminer la valeur d’un bien en utilisant la méthode d’actualisation des flux de revenus futurs. La valeur de l’usufruit correspond à la somme actualisée des revenus que ce bien générera dans le futur. Cette évaluation repose sur deux facteurs principaux :

  1. Le flux des revenus futurs
  2. La durée de l’usufruit

Le flux des revenus futurs

Les revenus sont évalués en fonction de la valeur locative potentielle du bien, tenant compte de sa situation géographique et de ses caractéristiques. Cette valeur locative peut être réévaluée périodiquement à l’aide d’un indice. Les revenus futurs bruts sont ensuite ajustés en fonction des charges liées à l’usufruit, telles que les travaux d’entretien, les réparations, et les impôts locaux, qui incombent à l’usufruitier.

La durée de l’usufruit

Dans le cadre d’un usufruit temporaire, en cas de décès de l’usufruitier avant la fin de la période, l’usufruit s’éteint immédiatement, même si la durée fixée n’est pas entièrement écoulée.

Cas d’un bien acquis neuf (ex : programmes IPLUS, PERL, FIDEXI…)

Pour un bien acquis neuf sous le régime de la nue-propriété (par exemple, dans le cadre d’une acquisition en VEFA ou d’un programme neuf), la valeur de la nue-propriété est calculée en fonction de la valeur d’acquisition initiale, de la quote-part attribuée, de la durée du démembrement et de la valeur actuelle du marché immobilier. La revente de ce bien en nue-propriété est parfaitement possible, sans obligation de détention minimale.

L’ensemble de ces facteurs permet d’obtenir une estimation précise et conforme à la réalité du marché actuel, en tenant compte des spécificités de chaque situation

Quel type d’évaluation en fonction du type de mutation

Concernant les droits d’enregistrement et assimilés (ISF, etc…) Mutation à titre onéreux Mutation à titre gratuit
Entre les parties Evaluation libre (économique ou fiscale) Evaluation libre (économique ou fiscale)
Avec l’administration Evaluation non libre (Article 669 du CGI = Fiscale) Evaluation non libre (Article 669 du CGI = Fiscale)
Concernant les plus-values, amortissement, inscriptions comptables Mutation à titre onéreux Mutation à titre gratuit
Entre les parties Evaluation libre (économique ou fiscale) Evaluation libre (économique ou fiscale)
Avec l’administration Evaluation choisie entre les parties (économique ou fiscale) Evaluation choisie entre les parties (économique ou fiscale)